Il y a une tranquillité affichée que l’on valorise (ce serait un signe extérieur de sagesse), à tort me semble-t-il. Parce qu’elle tient à la jouissance de privilèges socio-économiques et surtout à la regrettable ignorance du « sage » quant aux souffrances sociales des personnes qui l’entourent de près ou de loin. Cette jouissance privée tranquille (pour reprendre les termes avec lesquels Benjamin Constant définissait la liberté moderne) suppose la mise à distance aveugle des effets d’aliénation que les hiérarchisations sociales produisent. Cette tranquillité-là requiert la désolidarisation et un repli conservateur.
Elle n’est pas à confondre avec une forme de décontraction, d’insouciance, d’inconvenance même, plus joyeuse, qui facilite l’insubordination et le détachement à l’égard des normes. L’analyse critique ou déconstructrice de l’aliénation ne suffit pas, a fortiori si elle augmente le désespoir de celles et ceux qui subissent de plein fouet la violence sociale. Pour s’en sortir quand on ne peut précisément pas être tranquilles, il peut être sage de viser (de mimer d’abord ?) la décontraction. On y gagne en énergie et en résolution.